Le droit de retrait

 

Le droit de retrait est la faculté donnée au salarié de cesser son travail si celui-ci présente un danger.

 

Bien entendu tout est fonction des circonstances.

L’exercice de ce droit est codifié aux articles L 4131-1 et suivants du Code du travail.

L’article L 4131-1 du Code du travail dispose :
« Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d’une telle situation.
L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection. »

Mode d’emploi.

 

1. Les deux conditions du droit de retrait.

Le code du travail a posé des conditions d’application à l’exercice du droit de retrait afin d’éviter qu’il ne s’exerce à la légère.

Le salarié ne peut exercer ce droit qu’à la condition que son travail l’expose à un danger grave et imminent.

Il y a donc deux conditions cumulatives : Le salarié doit être exposé à un danger :

  • grave, c’est-à-dire mettant en péril sa santé, son intégrité physique ou sa vie ;
  • imminent, c’est-à-dire susceptible de se réaliser très rapidement.

Le danger peut être individuel ou collectif.
Cela signifie donc qu’il peut concerner un ou plusieurs salariés.

 

 

2. Exemples pratiques.

Le danger qui incite le salarié à exercer son droit de retrait peut être de différentes natures.

Il peut résulter des conditions matérielles dans lesquelles le salarié doit travailler.
Exemples :

  • Absence de matériel de sécurité sur un chantier.
  • Mise à disposition de matériaux défectueux ;
  • Dans ces deux exemples, le danger est grave et imminent.

Il peut aussi résulter des conditions juridiques imposées au salarié.

Exemple 1 : Un salarié peut se retirer si son employeur entend le faire travailler sans respect des conditions légales en matière de durée du travail.
On songe ainsi à des chauffeurs routiers obligés de rouler sur de trop longues distances sans pauses.

Exemple 2 : des chauffeurs de bus ont pu exercer leur droit de retrait après l’agression d’un de leur collègue alors que l’agresseur n’avait pas été arrêté.
Il y avait donc là un risque de réitération de l’agression.
A l’inverse, si l’agresseur est arrêté ou que des mesures de sécurisation de la ligne de bus sont prises, l’exercice du droit de retrait n’est plus possible car le danger n’est plus imminent.

Le droit de retrait doit cependant être exercé avec précaution par le salarié : celui-ci ne peut s’en prévaloir dans n’importe quelle situation.

Exemple : un employé de bureau ne peut exercer son droit de retrait en prétendant échapper à des courants d’air.

 

 

3. Hypothèse actuelle du coronavirus.

Venons-en à ce qui préoccupe énormément de monde : l’épidémie actuelle de coronavirus ou covid 19.

Bien entendu la question se pose légitimement : l’épidémie actuelle permet-elle de se prévaloir du droit de retrait ?

Tout est fonction des circonstances.

En effet, les conditions posées par l’article L 4131-1 du Code du travail ne changent pas.
Il faut un danger grave et imminent.

Travaillons donc sur quelques exemples et contre-exemples.

Exemples dans lesquels l’exercice du droit de retrait sera reconnu.

Exemple 1 : un chauffeur de car ou de bus qui est directement exposé à la promiscuité avec ses passagers est naturellement face à un danger grave et imminent.

Exemple 2 : Un professeur ou une maîtresse de classe, face à ses élèves toute la journée, sera également en danger de manière grave et imminente.

Exemple 3 : celui ou celle qui travaille derrière un guichet et reçoit du public est lui aussi en danger.

Etc.

Bref, tout travail qui vous place au contact du public et vous expose ainsi à la contagion redoutable du coronavirus vous permet de cesser votre travail.
Mais attention : si l’employeur prend les mesures nécessaires pour protéger ses employés, et que le risque disparaît, le droit de retrait disparaît aussi.

Exemple : si un employé, habituellement derrière un guichet et recevant du public, est placé derrière une vitre de protection ou tout autre moyen d’isolation, il n’y a plus de danger imminent.

Tout est donc affaire de circonstances.

Exemples dans lesquels le droit de retrait ne serait pas reconnu.

Exemple 1 : tous les salariés qui peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail ne pourront exercer leur droit de retrait.
Cela est assez logique car la double condition de danger grave et imminent n’est ici pas rapportée.

Pour plus d’information sur le télétravail, je vous invite à lire l’article suivant : Télétravail, mode d’emploi.

 

Exemple 2 : un employé qui travaille seul en agence et ne reçoit pas de public ne sera pas forcément en danger grave et imminent.

Exemple 3 : un conférencier qui exerce sous forme de visio-conférence ne pourra se prévaloir de son droit de retrait.

A chaque fois que le travail n’expose pas directement au virus, de façon imminente, tout retrait sera impossible.

 

 

4. Limite à l’exercice du droit de retrait.

Le droit de retrait a pour finalité de faire échapper un ou plusieurs salariés à un danger grave et imminent.

Ce n’est donc pas pour que son exercice se fasse au détriment d’autres salariés en les confrontant à leur tour à un autre danger grave et imminent.

C’est ce que prévoit l’article L 4132-1 du Code du travail qui dispose que « le droit de retrait est exercé de telle manière qu’elle ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent. »

L’exercice du droit de retrait ne sera donc pas autorisé s’il met d’autres salariés en danger de façon grave et imminente.

Le salarié qui envisage de cesser son travail doit donc veiller à la sécurité des autres.

 

 

5. Mise en œuvre du droit de retrait.

Le salarié doit prévenir son employeur de sa décision.

Il peut le faire oralement.

Un écrit n’est pas obligatoire mais est fortement recommandé pour des questions de preuve.

Il peut donc également le faire par :

  • Mail
  • Fax
  • Lettre simple
  • Lettre recommandée avec accusé de réception

 

 

6. Droits et obligations

 

a) Droits et obligations du salarié.

Lorsqu’il y a un danger grave et imminent pour le salarié ou ses collègues de travail, celui-ci a l’obligation de prévenir son employeur ou le représentant du personnel au comité social et économique.

Il peut le faire par tous moyens, verbaux ou écrits en tenant compte de l’urgence.

Le salarié qui exerce son droit de retrait doit rester à la disposition de son employeur pour que celui-ci puisse éventuellement l’affecter à d’autres taches.
Cela signifie donc que le salarié n’a pas le droit de rentrer chez lui.

L’exercice du droit de retrait est un droit, pas une obligation.

Conséquence : après avoir prévenu son employeur de l’existence d’un danger, le salarié n’est pas obligé de se mettre en retrait.
Il peut décider de continuer à travailler.

Enfin, le droit de retrait étant un droit absolu, son exercice ne peut pas être sanctionné.
De la même façon, l’employeur ne peut forcer son salarié à reprendre le travail tant que le danger grave et imminent n’est pas écarté.

b) Droits et obligations de l’employeur.

Avant même tout danger, l’employeur a une obligation de formation et d’information de ses salariés pour que ceux-ci apprennent à reconnaître des situations dangereuses.

Cela est prévu aux articles L 4141-1 et suivants du Code du travail.

Une fois le danger constaté, l’employeur a essentiellement deux obligations.

Il a l’obligation de tout mettre en œuvre pour faire écarter le danger grave et imminent à l’origine de l’exercice du droit de retrait.
Pour cela il pourra prendre toutes mesures nécessaires pour faire cesser le danger.

Il a également l’obligation de payer le salaire à son ou ses salariés sans la moindre retenue.

 

 

7. Conséquences du droit de retrait.

 

a) Hypothèse du droit de retrait justifié.

Si le droit de retrait est justifié, l’employeur devra prendre toutes mesures pour faire cesser le danger.
Durant la période de retrait, le salarié percevra son salaire.

 

b) Hypothèse du droit de retrait injustifié.

Si le salarié a cessé de travailler alors qu’il n’y avait pas de danger grave et imminent, l’employeur est en droit de prendre des sanctions à son encontre.

Il retiendra tout d’abord le salaire proportionnellement au temps de retrait.
Ainsi, si le salarié a exercé un retrait pendant 2 semaines, il ne percevra que la moitié de son salaire mensuel.

Mais surtout, l’employeur pourra ensuite entamer une procédure disciplinaire contre son salarié, s’il estime que ce dernier a exercé son droit de retrait en toute mauvaise foi.

L’employeur pourra prendre des sanctions à l’encontre de son salarié telles que :

  • Un avertissement ;
  • Une mise à pied disciplinaire.
  • Un licenciement.

  • Le droit de retrait s’exerce en cas de danger grave et imminent.
  • L’employeur doit prendre toutes mesures nécessaires pour faire cesser le danger.
  • Le salarié reste à la disposition de son employeur durant la période de retrait.
  • Le salarié perçoit son salaire durant le retrait.

 

Retrouvez les textes de lois relatifs au droit de retrait en cliquant sur le lien qui suit : le droit de retrait dans la loi.

REINS Didier
Avocat
17d, rue de Molsheim
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Tel : 03 88 32 42 15
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