La rupture du contrat de travail : période d’essai et délai de prévenance.

 

 

 

 

La conclusion d’un contrat de travail ouvre une période d’incertitude :

  • pour l’employeur qui ignore tout du salarié et de ses compétences.
  • pour le salarié qui ne sait pas si ce nouveau travail lui apportera satisfaction.

Le contrat de travail peut donc prévoir une période d’essai.

Si le contrat de travail ne prévoit rien, alors il n’y a aucune période d’essai et le salarié est censé avoir été recruté immédiatement en CDI.

La loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail a réglementé la période d’essai.

Cependant, les conventions collectives apportent souvent une réglementation propre à la période d’essai.

Durant la période d’essai, chaque partie peut rompre le contrat de travail en évitant le recours aux règles contraignantes du licenciement.

La durée de la période d’essai est fixée à l’article L 1221-19 du code du travail.

Celle-ci ne peut dépasser :

  • deux mois pour les ouvriers et les employés ;
  • trois mois pour les agents de maîtrise et les techniciens ;
  • quatre mois pour les cadres.

 

ATTENTION :  la rupture de ce contrat de travail ne peut se faire n’importe comment.

Il existe un délai dit de prévenance qui peut être un véritable piège pour l’employeur.

Le délai de prévenance peut se définir comme un préavis à l’intérieur de la période d’essai.

 

CONSÉQUENCE :  employeur ou salarié ne peuvent rompre brutalement le contrat de travail sans respecter un délai minimum.

Ce délai de prévenance est fixé à l’article L 1221-25 du code du travail comme suit :

  • 24 heures si le salarié est dans l’entreprise depuis moins de huit jours ;
  • 48 heures entre huit jours et un mois de présence dans l’entreprise ;
  • deux semaines après un mois de présence dans l’entreprise ;
  • un mois après trois mois de présence dans l’entreprise.

La convention collective peut toujours mettre en place un délai plus favorable au salarié.

Exemple : un contrat de travail est signé le 15 mars et prévoit une période d’essai.
L’employeur décide de rompre le contrat le 20 avril.
Le salarié a donc une « ancienneté » un mois et cinq jours : le délai de prévenance est donc de deux semaines.
Le délai de prévenance commencera le 21 avril pour s’achever deux semaines plus tard soit le 5 mai.

 

Les conséquences juridiques du délai de prévenance ne sont pas identiques selon la date à laquelle il s’achève.

 

I. Première hypothèse : le délai de prévenance s’achève durant la période d’essai.

Un employeur souhaite rompre le contrat de travail en pleine période d’essai.
Le délai de prévenance s’achève durant la période d’essai.

Exemple :
Un contrat de travail est signé le 10 juin.
La période d’essai est de quatre mois et s’achève le 10 octobre.
L’employeur souhaite rompre le contrat le 20 juillet.
À la date du 20 juillet, le salarié a une ancienneté d’un mois et dix jours.
Le délai de prévenance est de deux semaines et va donc du 21 juillet au 5 août.
Le délai de prévenance est  inclus dans la période d’essai dans la mesure où celle-ci devait s’achever le 10 octobre.
Le salarié pourra rester dans l’entreprise jusqu’au 5 août et percevra donc son salaire jusque-là.

L’employeur peut  lui demander de ne pas exécuter son délai de prévenance, mais devra le rémunérer jusqu’au 5 août.

Le principe est donc similaire au préavis applicable en matière de licenciement.

Le piège se situe dans la seconde hypothèse : celle où laquelle le délai de prévenance s’achève après la période d’essai.

 

II. Seconde hypothèse : le délai de prévenance s’achève après la période d’essai.

Un employeur rompt le contrat de travail quelques jours avant la fin de la période d’essai, soit à un moment où l’expiration du délai de prévenance se situe après la période d’essai.

Exemple 1 : un contrat de travail est signé le 1er juillet et la période d’essai s’achève le 31 octobre.
L’employeur décide de rompre le contrat de travail le 15 octobre.
Or, au 15 octobre, le cadre recruté est présent depuis trois mois et demi.
Le délai de prévenance est donc d’un mois et va jusqu’au 15 novembre, soit après la période d’essai qui, elle, s’achevait le 31 octobre.

L’employeur devra notifier à son salarié son intention de rompre le contrat de travail.

Il devra le dispenser d’effectuer son délai de prévenance.

Si l’employeur ne dispense pas son salarié d’effectuer le délai de prévenance, celui-ci sera donc présent dans l’entreprise après la fin de la période d’essai.
Dans ce cas,  l’employeur devra respecter les règles relatives au licenciement en convoquant son salarié à un entretien préalable et en lui notifiant une lettre de licenciement motivée.

Si vous souhaitez de plus amples conseils sur le contenu de la lettre de licenciement, cliquez sur CE LIEN.

La présence du salarié au delà de la période d’essai rend caduc tout délai de prévenance en cours.

Cela a été consacré par la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 16 septembre 2015.
Un cadre commercial avait été recruté et la période d’essai fixée par la convention collective était de quatre mois, renouvelable une fois, soit un maximum de huit mois.
Le délai de prévenance prévu par cette même convention collective était d’une semaine par mois de présence.
L’employeur décide de rompre le contrat  au bout de sept mois, soit un mois avant l’expiration de la période d’essai.
L’employeur avait dispensé son salarié de l’exécution du délai de prévenance et maintenu sa rémunération.
La Cour de cassation donne raison à l’employeur.

Exemple 2 : c’est là le piège.
Un contrat de travail est signé le 1er avril et la période d’essai est de trois mois, soit jusqu’au 30 juin.

L’employeur rompt le contrat de travail à la date du 20 juin et est donc tenu par un délai de prévenance de deux semaines soit jusqu’au 5 juillet.
Si l’employeur ne dispense pas son salarié de l’exécution du délai de prévenance, ce dernier restera donc dans l’entreprise jusqu’au 5 juillet.
Dans ce cas, le salarié était présent dans l’entreprise après l’expiration de la période d’essai, c’est-à-dire après le 30 juin.
Or, lorsqu’un salarié continu à travailler dans l’entreprise après la période d’essai, celui-ci est considéré comme définitivement engagé.
Peu importe qu’il soit en pleine période de prévenance.
Sa présence dans l’entreprise rend caduque la période de prévenance et valide son engagement.

C’est dans ce piège qu’est tombé un employeur, condamné par la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 5 novembre 2014.
Un directeur commercial est engagé le 17 janvier avec une période d’essai de trois mois, soit jusqu’au 16 avril.

Or, l’employeur rompt le contrat de travail par courrier du 8 avril et ne dispense pas son salarié d’exécuter le délai de prévenance.
Ce salarié quitte l’entreprise le 22 avril après le délai de prévenance et donc après l’expiration de la période d’essai…
Le salarié saisi le conseil de prud’hommes en soutenant que son contrat de travail s’étant poursuivi après la période d’essai, il bénéficiait donc d’un CDI définitif.

Pour rompre le contrat de travail, l’employeur devait dès lors suivre les règles applicables à la procédure de licenciement.
La Cour de cassation lui donne raison et rappelle que la période d’essai ne peut être prolongée au-delà de son terme du seul fait du délai de prévenance.
La Cour de cassation énonce :
«  en cas de rupture pendant la période d’essai, le contrat prend fin au terme du délai de prévenance s’il est exécuté et au plus tard à l’expiration de la période d’essai… la poursuite de la relation de travail au-delà du terme de la période d’essai donne naissance à un nouveau contrat de travail à durée indéterminée qui ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur que par un licenciement « 

L’employeur est tombé dans le piège en raison d’une méconnaissance de la réglementation très particulière du délai de prévenance.

Dans cette affaire, le délai de prévenance se trouvait à cheval entre le moment de la rupture du contrat de travail (quelques jours avant la fin de la période d’essai) et le moment où le délai de prévenance s’achevait soit après l’expiration de la période d’essai.

La condamnation est alors lourde pour l’employeur qui n’a pas respecté les règles relatives à la procédure de licenciement.

Dans les deux exemples jurisprudentiels qui ont été donnés, les employeurs ne s’en sont pas sortis de la même façon :

  • dans la première affaire, l’employeur avait dispensé son salarié d’effectuer le délai de prévenance et c’est ce qui l’a sauvé, car ainsi, ce dernier n’était pas présent dans l’entreprise après l’expiration de la période d’essai.
  • dans la seconde affaire, l’employeur avait demandé à son salarié d’exécuter le délai de prévenance, ce qui a conduit à sa condamnation puisque le salarié était présent dans l’entreprise après la période d’essai.

 

III. Conclusion.

 

 

 

La rupture du contrat de travail n’est pas  aussi simple que l’on croit.

La rupture d’une période d’essai doit s’accompagner d’un calcul strict des délais.

Il faut identifier le début et la fin du délai de prévenance.
Toute faute dans ces calculs peut conduire à une condamnation de l’employeur au profit du salarié.

On dit que le diable se cache parfois dans les détails.
En voici donc un exemple parfait.
Le droit du travail doit se manipuler avec une extrême prudence.

 

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