Divorce et dommages et intérêts.

 

 

Le divorce entraîne diverses conséquences.

Parmi celles-ci figure la possibilité d’obtenir des dommages et intérêts.

ATTENTION cependant, car il y a des conditions très précises.

Explications.

 

 

 

1. Les hypothèses concernées.

 

Le droit français distingue 4 types de divorce :

 

a) Les cas de divorce excluant toute indemnisation.

 

Il y a trois cas de divorce qui ne permettront pas d’obtenir des dommages et intérêts :

  • le divorce par consentement mutuel.

Cela est assez logique, car il s’agit là d’une forme de divorce à l’amiable dans laquelle les époux ne se font pas de reproches.

Cela exclut donc de facto toute forme d’indemnisation.

 

  • Le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage.

Il s’agit du cas où les deux époux sont d’accord pour divorcer, mais qu’ils ne s’entendent pas sur les conséquences du divorce (ex : pension alimentaire, garde des enfants, etc.)

 

  • Le divorce aux torts partagés.

Nous sommes là dans le cadre d’un divorce pour faute, mais dans lequel le tribunal estime que chacun des époux porte en partie la responsabilité de l’échec conjugal.

Dans ces conditions, il ne peut être question d’indemniser l’un des deux époux au détriment de l’autre.

 

Si votre intention est de faire condamner votre ex-conjoint(e) à des dommages et intérêts, vous devrez donc vous rabattre vers un divorce pour fautes au torts exclusifs ou vers un divorce pour altération du lien conjugal.

 

b) Les cas de divorce permettant d’obtenir des dommages et intérêts.

 

Parmi les différentes sortes de divorce, deux d’entre elles permettent d’obtenir des dommages et intérêts, à savoir : 

  • le divorce pour faute ;

Celui-ci est obtenu lorsque vous avez de sérieux reproches à faire à votre conjoint(e).

 

  • le divorce pour altération définitive du lien conjugal.

Il s’agit d’un cas de divorce que vous pouvez demander lorsque vous ne vivez plus depuis au moins un an avec votre époux/épouse.

Mais ATTENTION : il y a ici une condition spécifique : vous devez être défendeur à la procédure c’est-à-dire que c’est votre conjoint(e) qui doit saisir le tribunal contre vous et vous ne devez formuler aucune demande en divorce de votre coté.

 

Si vous êtes dans l’un de ces deux cas, il faut alors savoir sur quel fondement juridique vous allez formuler votre demande de dommages et intérêts.

 

 

 

2. L’indemnisation fondée sur l’article 266 du Code civil.

 

L’article 266 du Code civil dispose :

« Sans préjudice de l’application de l’article 270, des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d’une particulière gravité qu’il subit du fait de la dissolution du mariage soit lorsqu’il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu’il n’avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint. »

 

Pour obtenir des dommages et intérêts sur la base de l’article 266 du Code civil, il y a plusieurs conditions cumulatives à remplir :

  • vous devez être dans le cadre d’un divorce pour faute ;

OU :

  • vous devez être défendeur dans le cadre d’un divorce demandé par votre conjoint(e) pour altération définitive du lien conjugal ;

ET :

  • vous devez être victime de graves conséquences découlant du divorce.

 

Là réside toute la difficulté.

En effet,  le/la conjoint(e) qui sollicite des dommages et intérêts doit prouver que le divorce va créer pour lui/elle de graves conséquences.

Tout sera donc une question d’appréciation, mais il faut bien comprendre que les graves conséquences doivent découler du divorce.

Autrement dit, les griefs qui permettent d’obtenir un divorce n’entrent pas en ligne de compte.

Prenons un exemple précis :

  • Une épouse demande le divorce pour faute, car son mari entretient une relation adultérine ;
  • Si les preuves de l’infidélité de l’époux sont réunies, celle-ci peut en effet obtenir un divorce pour faute aux torts exclusifs de son mari ;
  • Juridiquement, l’infidélité du mari ne permet pas d’obtenir des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 266 ;
  • En effet, ce grief permettra d’obtenir le divorce pour faute ;
  • Mais ce grief ne suffit pas à prouver que le divorce en lui-même entraînera de graves conséquences ;
  • Pour que l’épouse trompée obtienne une indemnisation sur le fondement de l’article 266, il faudra qu’elle prouve l’existence d’un préjudice moral différent et découlant du divorce ;
  • Autrement dit, le seul grief d’infidélité permet d’obtenir une mesure de divorce pour faute ;
  • Mais pour obtenir des dommages et intérêts, il faudra que s’ajoutent de graves conséquences différentes du grief et qui sont la conséquence du divorce.

 

Quelles peuvent être alors ces graves conséquences ?

Ces graves conséquences peuvent être :

  • un sentiment de trahison ;
  • un traumatisme suite à des violences conjugales ;
  • un préjudice moral lié à des convictions religieuses ;
  • une dépression morale liée à un sentiment de chagrin.
  • Bref, tout préjudice d’ordre essentiellement moral qui suit le divorce, mais qui n’en est pas à l’origine.

 

Il faut donc savoir appréhender la situation et ne pas mélanger les concepts juridiques sous peine de voir votre demande de dommages et intérêts rejetée.

Conclusions : ne jamais confondre les griefs qui permettent de demander le divorce et le préjudice essentiellement moral qui découle de ce divorce et qui peut donner lieu à indemnisation.

 

ATTENTION : ne tardez pas pour demander les dommages et intérêts.

Votre demande doit être faite lors de la procédure en divorce et jamais après.

Autrement dit, n’attendez pas que le divorce soit prononcé pour demander cette indemnisation dans le cadre d’une nouvelle procédure.

 

 

3. Les dommages et intérêts obtenus sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.

 

Larticle 1240 du Code civil dispose :

« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

 

Il s’agit là d’un principe de responsabilité général, qui joue dans tous les aspects de la vie courante, y compris donc le divorce.

 

Dans ce cas précis, la différence est de taille par rapport à l’article 266.

En effet, avec l’article 1240 du Code civil, les griefs à l’origine du divorce permettront d’obtenir des dommages et intérêts alors que tel n’est pas le cas avec l’article 266 qui exige de graves conséquences découlant du divorce.

Alors pour bien comprendre reprenons notre exemple précédent :

  • une épouse demande le divorce pour faute, car son mari entretient une relation adultérine ;
  • juridiquement, le fait d’avoir une maîtresse (ou un amant) est une faute au regard de l’article 212 du Code civil qui pose pour principe une obligation de fidélité.
  • Dans ce cas, l’épouse qui demande le divorce pour faute pourra alors demander des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil en se prévalant de cette faute même si elle ne subit pas de graves conséquences découlant du divorce.

Avec l’article 1240, l’obtention de dommages et intérêts repose donc sur l’existence d’une faute et non d’un préjudice moral qui découlerait uniquement du divorce.

Dans ces conditions, toutes fautes conduisant à un divorce pour faute permettront de formuler une demande d’indemnisation :

  • infidélité ;
  • violences conjugales ;
  • abandon du domicile conjugal ;
  • etc.

 

4. Peut-on cumuler les articles 266 et 1240 du Code civil ou doit-on choisir l’un ou l’autre ?

Vous pouvez tout à fait cumuler les deux demandes.

Si un conjoint subit des préjudices de différentes natures, relevant de l’article 266 ET de l’article 1240 du Code civil, alors il peut formuler deux demandes d’indemnisations.

Exemple :

  • une épouse découvre que son mari la trompe ;
  • elle demande le divorce pour faute ;
  • Le grief d’infidélité lui permettra d’obtenir un divorce pour fautes aux torts exclusifs de son mari ;
  • L’infidélité conjugale étant une faute au regard de l’article 212 du Code civil, elle pourra obtenir des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 ;
  • Mais en plus, si le divorce entraîne pour elle de graves conséquences découlant du divorce en lui-même, en raison de son chagrin, de son traumatisme, de ses convictions philosophiques et/ou religieuses, elle pourra également demander à être indemnisée de ce préjudice particulier sur la base de l’article 266.

 

ATTENTION : il faut donc bien préparer votre dossier et votre argumentaire pour obtenir des dommages et intérêts que ce soit dans l’un et l’autre cas.

 

REINS Didier
Avocat
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