Garde alternée et domicile des parents.

 

 

 

Garde alternée et domicile des parents : la garde des enfants.

 

Sommaire

1. La mise en place de la garde alternée.

2. Les faits.

3. Les solutions retenues en jurisprudence.

4. Garde alternée et souhait de l’enfant.

 

Comment mettre en place une telle mesure ?

1. La mise en place de la garde alternée.

 

La garde alternée est un mode de fixation de la résidence des enfants mineurs.

La garde alternée suppose que les parents vivent à proximité l’un de l’autre.

Voyons cela à partir d’un exemple concret.

Le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de Strasbourg a rendu une décision intéressante en date du 07 mars 2016.

Celui-ci a tranché une question  de résidence des enfants mineurs en ne tenant compte que de leur seul intérêt après avoir pourtant ordonné leur audition et passé outre la volonté exprimée par ces enfants.

 

Le cas concret ;

2. Les faits.

Les parties s’étaient mariées en 1997 à Strasbourg.

Deux enfants étaient issus de cette union, âgés respectivement de 15 et 11 ans au moment du conflit.

En 2012, le Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE prononce le divorce.

Selon les termes de ce jugement, la résidence des enfants avait été fixée au domicile de la mère.

Le père s’était alors vu octroyer un droit de visite et d’hébergement comme suit :

 » –   Hors vacances scolaires, les fins de semaine paires (par référence à la numérotation des semaines sur un calendrier) du vendredi soir dès la fin des activités scolaires au dimanche soir 20 heures ;

–   Pendant les vacances scolaires, la première moitié les années paires et la deuxième moitié les années impaires ;

Or, en 2015, le père saisi le Tribunal et sollicite l’instauration d’une garde alternée.

La mise en place d’une garde alternée aurait été perturbante pour les enfants car cela aurait constitué  une charge trop lourde.

Un tel mode de garde suppose  que les parents habitent à proximité, et ne passent pas leur temps sur la route ou dans les embouteillages.

En l’espèce, la distance entre les deux domiciles était de 25 km.

Lorsqu’il n’y a pas de circulation, il fallait environ 40 minutes pour se rendre d’un domicile à l’autre.
Et en cas de  circulation, le temps de trajet était facilement de 50 minutes.

Or, il y a de la circulation chaque matin, entre 7 heures et 8 heures, c’est-à-dire quand les gens partent au travail.
Les enfants allaient à l’école où réside leur mère.
Dans le cas d’une garde alternée, les enfants devaient  faire ce trajet chaque matin, de 7h15 à 8h, ou de 7h à 7h45, pour aller à l’école.

Ce rythme aurait  été épuisant pour eux.

L’instauration d’une garde alternée était donc contraire à l’intérêt  des enfants.

 

Quelles sont les décisions habituellement retenues par les tribunaux ?

3. Les solutions retenues en jurisprudence.

La jurisprudence est on ne peut plus claire :

La mise en place d’une garde alternée impose une  proximité afin d’éviter que celle-ci ne pèse trop lourdement sur les enfants.

Voir en ce sens :

Cour d’Appel de Dijon, 13 décembre 2007, Z.R. / R.

«  … l’école de l’enfant est située à une distance proche de son domicile (le domicile de la mère). M. R. …   demeure à 20 km du domicile et de l’école de l’enfant. Aussi dans l’intérêt de l’enfant, il convient de rétablir la situation antérieure et de fixer à titre principal la résidence de l’enfant au domicile de la mère et d’accorder au père un droit de visite et d’hébergement … »

Cour d’Appel de Colmar, 29 octobre 2013, X / Y

«  Depuis septembre 2013, Nathan est scolarisé à l’école maternelle du lieu de domicile de la mère…

… il est manifeste que les modalités de résidence alternée fixées par le jugement déféré ne sont plus adaptées, dès lors que l’enfant, lorsqu’il réside chez son père, est contraint de se lever tôt pour se rendre à l’école et d’effectuer de nombreux trajets fatigants pour lui.

Par conséquent, dans l’intérêt de l’enfant, il convient de fixer la résidence principale au domicile maternel. »

 

Cour d’Appel de Bordeaux, 29 février 2012, Laurence T. c/ Christophe A.

 » Toute décision relative à la résidence d’un enfant doit être prise dans l’intérêt supérieur de celui-ci ; …

La garde alternée suppose que les parents résident à peu de distance l’un de l’autre… »

Cour d’Appel de Lyon, 15 septembre 2015 – X / Y :

 » Attendu que le premier juge a considéré que l’intérêt supérieur de l’enfant exclut la mise en œuvre d’une résidence alternée ; … Attendu que l’éloignement géographique existant entre les domiciles parentaux exclut à lui seul la mise en place d’une résidence alternée. »

Cour d’Appel de Chambéry, 12 octobre 2015 – X / Y :

 » Attendu qu’en l’espèce, au vu de l’éloignement géographique entre les domiciles respectifs des parents, … il apparaît impossible et contraire à l’intérêt de l’enfant de mettre en place aujourd’hui une résidence alternée. »

 

La jurisprudence appliquait le Code Civil qui invite le magistrat à ne tenir compte que du seul intérêt de l’enfant.

Cela ne signifie pas pour autant que les désirs des parents sont ignorés par le tribunal.

Ils sont un facteur de réflexion important, mais ils ne peuvent balayer le bien-être de l’enfant.

Le juge aux affaires familiales devra donc répondre à une question et une seule : quel est l’intérêt  de l’enfant ?

  • l’intérêt  de l’enfant est-il de vivre  au domicile de ses parents dans le cadre d’une garde alternée ?

ou :

  • l’intérêt  de l’enfant est-il de vivre chez l’un de ses parents et d’aller chez son autre parent dans le cadre d’un droit de visite et d’hébergement ?

 

Rappelons que sauf circonstances particulières, la règle est  celle de la garde alternée.

Les circonstances particulières résideront dans ces éléments de faits tel qu’un éloignement  important des parents.

Le juge aux affaires familiales a donc fait une exacte application de la loi et de la jurisprudence.

Sa décision était d’ailleurs sans ambiguïté :

« Si Monsieur F.T. indique qu’il bénéficie d’une grande souplesse dans l’organisation de son emploi du temps et qu’il peut donc se rendre disponible pour amener Lisa au collège, il n’en justifie pas. Il ne donne, non plus, aucune information sur les modalités de transport de Luc pour se rendre au lycée et la coordination des trajets à effectuer pour les deux enfants.

Au plus court, le temps de trajet entre le domicile de Monsieur F.T. et le collège de Lisa est de 35 minutes sans tenir compte des difficultés de circulations. Selon les semaines, l’enfant commence les cours au collège 3 ou 4 fois à 7h50 et ses horaires vont nécessairement changer à chaque rentrée scolaire ;

Il résulte de ces éléments que la distance entre le domicile du père et les lieux de scolarisation des enfants est trop importante pour mettre en place une résidence alternée des enfants. Les enfants seraient alors soumis à un rythme trop soutenu pour leur âge en termes d’heures de lever et de temps de transport. »

Sa décision ne pouvait être critiquée.

 

Faut-il tenir compte du souhait de l’enfant ?

4. Garde alternée et souhait de l’enfant.

En l’espèce, les enfants avaient demandé à être auditionnés.

Lorsque les enfants demandent à être entendus, cette audition est  » de droit  » et ne peut être refusée par le tribunal.

Lors de cette audition, les deux enfants avaient dit vouloir vivre  avec leur père et leur mère, ce qui signifiait  l’instauration  d’une garde alternée.

On aurait pu se dire que le magistrat allait ordonner une telle mesure.

Or, si le souhait de l’enfant est  facteur d’éclaircissement et une sortie de crise possible, il n’en est pas toujours ainsi.

Les désirs de l’enfant peuvent être contraires à son intérêt ;

Le tribunal est donc là pour apporter un équilibre.

Le juge aux affaires familiales a donc passé outre le souhait  exprimé par les deux enfants.

Sa décision est sans ambiguïté .

 » Si les enfants ont à cœur de partager plus de temps avec leur père, ils ne sont pas en mesure de prendre conscience des contraintes qu’une telle résidence alternée engendrerait pour eux, notamment en terme de fatigue.

Dans l’intérêt des enfants, la résidence principale de Luc et Lisa sera donc maintenue au domicile de la mère « 

 

La règle de droit est donc supérieure à la volonté de ceux auxquels elle s’applique.

Le père n’a pas fait appel de cette décision.

Deux mois plus tard, il a déménagé à 2 km du domicile de la mère et a redemandé la garde alternée qui a  été acceptée par celle-ci.

Retrouvez les articles de lois relatifs à la garde alternée ICI.

 

REINS Didier
Avocat
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